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Jardin du manoir de Clairbois, à Larçay, en 1896

LA FAMILLE MIQUEL-DENOUILLE À LARÇAY

Le docteur Jean Félix Miquel naît à Montrésor le 13 fructidor an IV (30 août 1796) et décède à Tours, en son domicile, quai Foire-le-Roi, n°3, le 9 avril 1875.

Entre 1815 et 1835, Pierre Fidèle Bretonneau (1778-1862), à l'Hospice général, distingue et forme de remarquables élèves, dont Miquel (1815), Velpeau (1816), Trousseau (1822) et Moreau (1824) à qui il transmet ses idées et inspire une carrière médicale. Enseignant, il a un rôle considérable : il observe le malade, il décrit les signes cliniques qu'il rapporte à des lésions tissulaires et individualise des maladies. Il met en évidence le mécanisme de la contagion. Jean Félix Miquel en est le témoin et donnera, avec Tonnelé, F. Leclerc, M. Duclos et beaucoup d'autres, une grande réputation clinique à l'École de Médecine de Tours.

En 1842 est votée la loi sur les chemins de fer, qui dessine le réseau. Au 1er janvier 1848, il existe 1860 kilomètres de voies ferrées réparties entre vingt-huit compagnies. En 1850, la ligne de Bordeaux ne dépasse pas Tours et suit les arrêts de la malle-poste. Entre 1840 et 1850, les ouvriers qui construisent les premières lignes de chemin de fer, de recrutements divers, représentent une catégorie peu favorisée, la commission administrative de l'hospice général se plaint d'avoir à supporter la charge qu'ils représentent, avec des accidents, des maladies infectieuses et vénériennes qu'ils partagent avec des femmes également soignées à l'hospice. Ils ne consultent pas les praticiens établis. La compagnie créera un service médical, Jean Félix Miquel sera médecin des chemins de fer. Il sera nommé Chevalier de la Légion d'honneur par décret du 11 mars 1870.

La fille de Jean Félix Miquel, Laure Henriette, épouse Charles Hippolyte Denouille, avocat de métier, et met au monde une petite fille, Adèle, le 12 décembre 1864 à Larçay. Le couple habite à Paris, au 51 rue des Belles Feuilles (16ème) et effectue des séjours dans la maison de famille de Laure Henriette, à Larçay. Charles Hippolyte Denouille décède le 16 mars 1902 à l'âge de 83 ans.

Un magnifique portrait d'Adèle Denouille, peint par Léon Bonnat (1833-1922) en 1884, alors qu'Adèle a tout juste 20 ans, fait partie des collections du Musée des Beaux-Arts de Tours. Adèle porte une élégante tenue de soirée, une robe de bal en satin et mousseline assortie d'une paire de longs gants. Ce portrait a été légué au Musée des Beaux-Arts de Tours en 1919, à la mort d'Adèle, célibataire (20 février 1919 à son domicile, dans le 16ème arrondissement de Paris), comme un grand nombre de meubles, peintures, dont on retrouve la trace au Musée des Arts Décoratifs de Paris, notamment et dans les catalogues de 1919, de l'Hôtel Drouot. J'en profite pour remercier le service de la Documentation du Musée des Beaux-Arts de Tours pour la transmission de ce cliché de la peinture de Léon Bonnat.

1947-40-19 Bonnat Léon, Portrait de Mademoiselle Denouille©Musée des Beaux-Arts de Tours, cliché D. Couineau
1947-40-19 Bonnat Léon, Portrait de Mademoiselle Denouille©Musée des Beaux-Arts de Tours, cliché D. Couineau

LES PRINCIPALES PARCELLES DE PROPRIÉTÉ DE LA FAMILLE MIQUEL-DENOUILLE

Section B1 du bourg de Larçay, 1808, 6NUM10/124/003 (Cote), Archives d'Indre-et-Loire©

La famille Miquel-Denouille possède (liste non exhaustive) les parcelles suivantes :

  • 55, le bas bourg, jardin
  • 58, le bas bourg, maison et sol
  • 75, le bas bourg, orangerie
  • 76, le bas bourg, maison et sol
  • 89, le bas bourg, maison et sol
  • 91, le bourg, jardin
  • 95, le bourg, terre
  • 96, le bourg, pré, etc.

VISITE DU JARDIN DE M. DENOUILLE LE 13 SEPTEMBRE 1896

Le dimanche 13 septembre 1896, une Commission de la Société d'Horticulture de Touraine, composée de MM. Buret, bibliothécaire, Besnard, Dupont, Fierdepied, Griveau, Lemoine, se rend à la propriété de M. Denouille, à Larçay, sur demande de M. Després. Le compte-rendu de M. Lemoine nous permet d'avoir une description très précise de la propriété du temps d'Adèle.

"Après une gracieuse réception dont nous remercions sincèrement notre collègue, nous commençâmes la visite de la propriété. Elle est bordée par le Cher et renferme une petite rivière et de nombreuses pièces d'eau, ce qui lui donne un air de fraîcheur et de gaité que n'ont pas les parcs où le régime des eaux fait défaut; de nombreuses rocailles disposées avec goût, de beaux arbres et quelques kiosques concourent aussi dans une large part à embellir cette résidence.

La maison d'habitation est exposée au levant et les vues s'étendent sur le parc et la vallée du Cher, toute la façade, encadrée de Lauriers roses, de Musa et d'Orangers, est plantée de Salvia très bien fleuris. De nombreux massifs sont disposés alentour : au sud, Pelargonium zonale 'Docteur Thouvenet' et 'Victor Hugo', avec bordure d'Achyrantes verschaffeltii; au nord, Begonia ascotiensis, bordé de Begonia bruanti blanc, plus loin dans le fond on aperçoit un massif composé de Salvia, Pelargonium zonale 'Villars' et 'Paul-Louis Courier', avec bordure de Pelargonium zonale 'Mac-Mahon'; à quelques pas de là, des Érables negundo à feuilles panachées et des Noisetiers à feuilles pourpres, avec une bordure de Pelargonium zonale en mélange faisant un massif très riche à cause du contraste produit par les feuillages.

Ces arbustes dissimulent un petit potager dans lequel se trouve le carré des couches, une orangerie et deux serres servant à la conservation des plantes à massifs.

Devant l'habitation, on voit des corbeilles en mélange de Pelargonium zonale et diverses plantes avec bordure de mosaïque. Plusieurs arbres de belle venue ornent cette partie du parc; nous avons remarqué un superbe Epicea de 25 mètres de hauteur, de beaux Tilleuls argentés, un Noyer d'Amérique, des Magnolias; sur une pelouse voisine on voit un beau Cèdre ne mesurant pas moins de 1 mètre de diamètre, et tout près un massif de Balisiers race Crozy, malheureusement la période pluvieuse que nous traversons a fait le plus grand tort aux fleurs, cependant on reconnaît encore : 'M. Crozy', 'Explorateur Crampel', 'Reine Charlotte', 'Nardy Père', 'Amiral Gervais', etc.

En continuant notre promenade, nous avons traversé un pont garni de rocailles bien disposées, et nous avons suivi une allée que côtoie le Cher. Près de ce pont, il y a un beau Pinsapo, plus loin on rencontre un Abies morinda d'une belle taille, et un groupe de Liquidambars de toute beauté. Différents massifs se trouvent sur notre parcours, leur composition est à peu près la même que celle de ceux décrits précédemment, sauf que nous trouvons des mélanges de plantes annuelles.

À l'extrémité de la propriété, un grand kiosque rustique assez bien conservé et très élevé tenta quelques membres de la Commission qui voulurent jouir du coup d'oeil de la vallée du Cher, mais ils avaient compté sans des frelons, hôtes habituels des vieux bois, qui leur firent voir qu'il ne fallait pas s'aventurer du côté de leur domicile.

Pour revenir, nous sommes passés près d'un rond-point au centre duquel se trouve un kiosque rustique imitant la forme d'un champignon : des roches et grottes l'accompagnent et font de ce coin un des endroits les plus agréables de la propriété.

Partant de là, nous suivîmes une magnifique avenue d'Aulnes de près de 400 mètres de longueur, bordée à droite d'une pièce d'eau avec île; des rochers nombreux, des kiosques et quelques massifs s'offrirent encore à notre vue, puis nous entrâmes dans le potager situé le long et en contrebas de la route de Tours à Nevers; il est froid et humide à cause du voisinage de l'eau, les légumes sont beaux mais les arbres fruitiers laissent à désirer, d'autant plus qu'ils sont écrasés en partie par les arbres qui composent les massifs séparant le potager du reste du parc.

Notre collègue a un seul ouvrier, fort âgé, pour l'aider à entretenir cette grande propriété, de sorte qu'il a beaucoup à faire, aussi la Commission, voulant récompenser son travail, a l'honneur de prier notre Société de lui accorder une médaille d'argent petit module.

Le rapporteur, H. Lemoine."

Larçay, le bourg, carte postale de 1912, Delcampe.net/moon 86©
Larçay, le bourg, carte postale de 1912, Delcampe.net/moon 86©

LE PATRIMOINE VÉGÉTAL DE LA FIN DU XIXE SIÈCLE EN FRANCE

Nous allons remonter le temps et évoquer tour à tour les espèces botaniques et variétés horticoles qui garnissaient le jardin des Miquel-Denouille à Larçay en 1896 et si vous avez envie de savoir ce qu'est devenue cette propriété, c'est une maison d'hôtes, que vous pouvez découvrir en cliquant sur ce lien.

Les Sauges (le genre Salvia, famille des Lamiaceae)

Le genre botanique Salvia renferme des plantes annuelles ou vivaces, ou des sous-arbrisseaux plus ou moins rameux ou buissonnants. Ces espèces sont répandues dans presque tous les climats tempérés ou tempérés chauds. Dans l'Europe australe, ainsi que dans l'Afrique septentrionale et en Asie, apparaissent plus communément les espèces herbacées; l'Afrique australe, l'Amérique méridionale, surtout le Mexique, sont les lieux où les formes suffrutescentes (= qui a les caractères du sous-arbrisseau) sont les plus fréquentes. Une dizaine de sauges sont indigènes d'Europe, par exemple la sauge des prés (Salvia pratensis L., 1753). Les sauges étaient considérées au Moyen Âge comme une panacée, un remède, car certaines espèces possèdent de nombreuses vertus médicinales, comme la sauge sclarée (Salvia sclarea L., 1753) et la sauge officinale (Salvia officinalis L., 1753), avec lesquelles on faisait des infusions et des décoctions.

La Revue Horticole de 1909 présente la Salvia patens, appelée communément "sauge de gentiane" ou "sauge à tartiner", qui a commencé à être plantée dans les jardins français à partir de 1838; il est donc tout à fait possible qu'elle ait fait partie des collections du jardin de la famille Miquel-Denouille.

Voici un extrait de 1909 : "Si nous voulions faire ici une étude du genre Salvia, même limitée aux espèces introduites et plus ou moins cultivées dans les jardins, un numéro de ce journal n'y suffirait pas. Des 500 espèces botaniquement décrites, plus d'une centaine sont mentionnées dans les ouvrages horticoles. Si une vingtaine ne suffisaient amplement à la décoration des jardins, ce nombre pourrait être notablement augmenté, car la plupart des Sauges sont remarquables à divers titres. De temps à autre, d'ailleurs, certaines espèces, soit réellement nouvelles, soit anciennes et oubliées, font leur apparition sur la scène horticole et disparaissent de nouveau plus ou moins tôt, faute de supériorité bien marquée sur celles déjà admises dans l'ornementation usuelle de nos jardins. Quelle espèce pourrait, au reste, venir contester la préférence à la Sauge éclatante (Salvia splendens Sellow ex Nees, 1821), dont les variétés améliorées par la culture sont, on peut le dire, sans rivales parmi les plantes à corbeilles ! Leur couleur rouge éclatante est d'ailleurs en minorité dans le genre, et le jaune y est plus rare encore. La dominante, chez les espèces spontanées, est le bleu, souvent remarquablement pur. Mais il n'est sans doute aucune autre espèce dont les fleurs puissent rivaliser, pour l'intensité et la pureté du bleu, avec celles de la Sauge à grandes fleurs, plus généralement désignée sous son nom latin Salvia patens. S'il était nécessaire de s'en convaincre, il suffirait de jeter un coup d'oeil sur la belle planche coloriée ci-contre, que la Revue Horticole a fait peindre, au cours de l'été dernier, dans les cultures de M. Nonin. Ce n'est certainement pas le bleu de cette Sauge qu'on pourrait qualifier, comme on le fait parfois par ironie, pour celui de beaucoup d'autres fleurs, de "bleu de jardinier". Elles sont, en effet, d'un bleu outremer foncé qu'on n'admire qu'exceptionnellement chez d'autres plantes. À ce mérite, la plante joint encore l'ampleur de ses fleurs, qui dépassent 5 centimètres de diamètre et surpassent celles de la plupart de ses congénères. Cette espèce botanique passe pour avoir été introduite du Mexique, son pays natal, vers 1838, par M. Page, de Southampton. Rappelons que la plante est vivace, à racines épaisses, charnues. Elle atteint 60 à 80 cm de hauteur et ne développe que quelques tiges florales, généralement simples, ne portant elles-mêmes qu'un petit nombre de fleurs épanouies à la fois, mais qui se succèdent durant assez longtemps, de juillet à septembre." Article signé S. Mottet.

Goffart, J. L. et Guillot, J. R., Revue Horticole 1909, Hortalia©
Goffart, J. L. et Guillot, J. R., Revue Horticole 1909, Hortalia©


Les Lauriers-Roses (Nerium oleander L.)

Plantes qui nous sont désormais très familières, les lauriers-roses étaient déjà des plantes appréciées pour leur floraison estivale à la fin du XIXe siècle, comme en témoigne cet extrait de la Revue Horticole de 1890 : "Si les arbustes à floraison estivale rendent beaucoup de services dans le Midi, le Laurier-Rose peut se placer au premier rang. Quel plus beau spectacle qu'un massif de Lauriers-Roses mélangé de diverses variétés aux couleurs si chatoyantes et si belles ! Leur floraison, qui commence dans les premiers jours de juin, se continue sans interruption jusqu'à la fin d'octobre. Quel arbuste peut revendiquer une si grande floribondité ? Aussi est-ce improprement, à mon sens, qu'on l'a surnommé le Rhododendron du Midi. Le Laurier-Rose fleurit près de cinq mois, tandis que la floraison du Rhododendron dure à peine quinze jours ou trois semaines. Il ne faut pas croire que le Laurier-Rose ne puisse rendre de grands services que dans le Midi. Dans le Nord, aussi, on peut l'utiliser pour la décoration florale des jardins, en ayant soin, toutefois, de l'abriter en hiver ou de le rentrer dans une orangerie ou une serre froide." Article signé J. Martin. Effectivement, c'était le cas dans le jardin de la famille Miquel-Denouille, où les Lauriers-Roses encadraient toute la façade de la maison.

Planche extraite de Bessa, Pancrace Flore des jardiniers, amateurs et manufacturiers : extraits de l'herbier de l'amateur, 1836, Hortalia©
Planche extraite de Bessa, Pancrace Flore des jardiniers, amateurs et manufacturiers : extraits de l'herbier de l'amateur, 1836, Hortalia©

Le Pelargonium zonale (L.) L'Hér.

Cette espèce botanique, originaire d'Afrique du Sud, est l'ancêtre de tous les pélargoniums horticoles à feuilles zonées (= qui présentent des bandes transversales colorées) qui ont été créés à partir de son introduction en Europe fin XVIIe/début XVIIIe. Les premières améliorations variétales et hybridations sont expérimentées en Angleterre vers 1820, mais c'est en France, à partir des années 1835 que les horticulteurs développement véritablement les qualités de cette plante : floraison abondante, diversité de couleurs et dans la forme des fleurs et des feuilles. En 1842, Charles Lemaire (directeur de plusieurs grandes revues horticoles) et Alexandre Chauvière (membre de la Société nationale d'horticulture de France) rédigent un traité de culture sur les Pélargoniums, qu'ils destinent autant aux professionnels qu'aux novices. La mode du Pélargonium est lancée en France !

Particulièrement apprécié pour garnir les massifs et corbeilles des parcs et jardins du XIXe siècle, l'horticulteur Thibaut, de Paris, le décrivait ainsi dans son ouvrage intitulé Pelargonium, en 1867 : "Cette espèce, par la richesse de ses ombelles et le brillant de ses fleurs, est devenue un des plus magnifiques ornements de nos parterres, où on la cultive en massifs dont l'effet est éblouissant. Elle réussit admirablement, mise en pleine terre pendant l'été, sous le climat de Paris, où sa floraison, commencée dès la fin de juin, se prolonge sans interruption jusqu'aux gelées de l'automne. Elle est du cap de Bonne-Espérance et son introduction en Europe remonte au moins à l'année 1710, où elle était cultivée dans les jardins de la duchesse de Beaufort, en Angleterre."

Les variétés de Pelargonium zonale installées dans le jardin des Miquel-Denouille étaient : 'Docteur Thouvenet', 'Victor Hugo', 'Mac-Mahon', 'Villars' et 'Paul-Louis Courier'... Aimable clin d'oeil lorsque l'on pense que le célèbre écrivain fut assassiné non loin de là, dans son bois de Larçay le 10 avril 1825. Ces variétés existent-elles encore aujourd'hui ?

Toujours est-il que dans la littérature horticole de 1883, les variétés 'Paul-Louis Courier' (cramoisi, obtention Lemoine) et 'Docteur Thouvenet' (écarlate, obtention Bruant) figuraient parmi les plus recommandées.

Pelargonium zonale au n°1, hybrides pour les n°2 et 3, Wikipedia©
Pelargonium zonale au n°1, hybrides pour les n°2 et 3, Wikipedia©

Le kiosque champignon, dans le parc

Au XIXe siècle, l'un des modèles les plus simples de kiosques rustiques est celui que l'on a nommé "kiosque champignon". Il se compose d'un mât fixé dans le sol, surmonté d'un parasol de paille, de roseau ou de zinc, formant un toit conique. Souvent, même, on emploie comme support le tronc d'un arbre, ce qui produit des effets assez pittoresques. Le modèle le plus commun de ces sortes de champignons, ordinairement situés au sommet d'une butte et auquel on accède par un escalier rustique, est représenté ci-dessus. Un banc est placé autour du mât central, élancé. Des plantes saxatiles (= qui vivent dans les terrains pierreux) sont dispersées entre les rocailles qui l'accompagnent. On peut remplacer le banc circulaire par une table et installer autour de lui des sièges mobiles.(Source : L'art des jardins, Édouard André, 1879).

Kiosque champignon conique, en bois, avec toit en chaume. L'art des jardins©

Le Tilleul argenté (Tilia tomentosa Moench)

Les grandes qualités du tilleul argenté étaient déjà connues à la fin du XIXe siècle car on peut dire que cet arbre a tout pour lui : vigueur et noblesse de port, feuillage abondant, très joli et longuement persistant, fleurs très nombreuses, fortement et agréablement odorantes. Voici la description de cette espèce botanique, donnée en 1892 par Pierre Mouillefert dans son ouvrage Traité des arbres et arbrisseaux :

"Grand arbre à cime ovale arrondie, très branchue. Tronc grisâtre à écorce restant longuement lisse; jeunes branches brun grisâtre; pousses rougeâtres ou grisâtres, tomenteuses. Bourgeons obtus, gris rougeâtre, tomenteux. Feuilles cordiformes ou cordiformes orbiculaires, ordinairement aussi larges que longues, finement dentelées, courtement acuminées, cuspidées, cotonneuses blanchâtres en dessous, non barbues aux aisselles. Cimes denses; fruit obovoïde, pentagone, velouté. Floraison en juillet. Le Tilleul argenté croît dans la Hongrie, la Transylvanie, la Croatie, la Serbie, la Russie australe et sur plusieurs points de l'Asie septentrionale. Introduit en Angleterre vers 1767 par Gordon, le directeur des jardins de Kew, Aiton en envoya quelques pieds vers la fin du siècle à Thouin et à Cels, qui le propagèrent par greffe, l'un au Muséum de Paris, l'autre dans ses pépinières d'Arcueil, et les premiers individus fleurirent en l'an VI de la République. C'est l'un des plus beaux, sinon le plus beau du genre au point de vue ornemental; il se fait surtout remarquer par son port particulier et son beau feuillage blanc argenté. Sa rusticité est comme celle des autres espèces, considérable. On le propage de semis ou le plus souvent par greffe sur le Tilia grandifolia, mais de tempérament plus robuste que son congénère, il grossit davantage et forme au niveau de la greffe un bourrelet désagréable à la vue; aussi doit-on le greffer le plus près de terre possible."

Traité des arbres et arbustes, 2nde édition, Duhamel du Monceau, 1800-1805

À suivre...